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La messe orientée

Editorial de Monseigneur Pascal N’Koué, archevêque de Parakou

dans son bulletin diocésain du mois de juillet 2016

Le prêtre à l'autel doit-il faire face au peuple, ou se tourner avec les fidèles vers l'Orient, le Soleil levant ? Le Cardinal Sarah, auteur du grand livre "Dieu ou rien", tranche dans le vif : "Le Concile n'a jamais demandé de célébrer face au peuple." (...)

J'ai toujours été insatisfait de la position des autels qu'on met entre le prêtre et le peuple, où on se fait face à face. On m'avait toujours dit que c'était le Concile Vatican II qui l'avait décrété. Un autre argument qu'on donne souvent c'est que ce n'est pas poli de célébrer la messe "dos au peuple". (...)

J'en étais là quand un jour, j'ai découvert un livre d'une grande valeur. Voici ce que j'y ai lu : ''Après le Concile (qui lui-même ne mentionne pas de se tourner vers le peuple), on disposa partout de nouveaux autels tant et si bien que l'orientation de la célébration ''versus populum'' (face au peuple) paraît aujourd'hui la conséquence du renouveau liturgique voulu par le Concile Vatican II'''. Ceci est un extrait de L'esprit de la liturgie, du Cardinal Joseph Ratzinger, devenu le Pape Benoît XVI. Plus loin, il écrit ceci : ''En revanche, l'orientation commune vers l'Est pendant le Canon (ou Prière Eucharistique) demeure essentielle. Il ne s'agit pas d'un élément accidentel de la liturgie. L'important n'est pas de regarder le prêtre mais de tourner un regard commun vers le Seigneur. Il n'est plus question ici de dialogue mais d'une commune adoration''. Et l'ancien Préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi conclut son plaidoyer par cette nuance : "il n'est justement pas question de fuir dans un passé romantique et lointain, mais de redécouvrir l'essence de la liturgie chrétienne".

Effectivement le Concile Vatican II ne donne aucune directive sur la position du prêtre à l'autel. (...)

La prière liturgique vers l'Orient tient compte non seulement de la tradition depuis l'origine du christianisme mais aussi du cosmos. Cette position tient compte du passé et nous dispose à marcher vers le règne du monde à venir. (...)

La liturgie orientée est commune à plusieurs religions

Entre nous, quand nous regardons les musulmans, l'imam et ses fidèles, tous se tournent vers l'est, vers la Mecque, pour prier. Quand nous regardons du côté de la religion traditionnelle africaine, c'est la même chose : le sacrificateur et ses adeptes se tournent tous vers ce qui représente la divinité (une montagne, une source, un arbre etc.) pour offrir leur sacrifice à Dieu. Personne ne pense que le sacrificateur tourne le dos aux autres. Dans l'Ancien Testament, toutes les synagogues étaient orientées vers le Temple de Jérusalem. Toutes les grandes religions se tournent vers quelque chose de sacré ou vers quelque divinité. L'homme qui n'est pas un pur esprit a besoin de cette orientation, même si Dieu est partout. Je me demande si l'inculturation liturgique en Afrique ne devrait pas commencer par l'orientation et la position du prêtre sacrificateur à l'autel ?

Un dernier témoignage, et non des moindres, puisqu'il vient de celui à qui le Pape François a confié la liturgie dans l'Eglise, j'ai nommé le Cardinal Robert Sarah, Préfet de la Congrégation pour le Culte Divin et la discipline des Sacrements. Il appelle à une conversion intérieure pour remettre Dieu au centre de la liturgie : « Se convertir, c'est se tourner vers Dieu. Je suis profondément convaincu que nos corps doivent participer à cette conversion. Le meilleur moyen est certainement de célébrer - prêtres et fidèles - tournés ensemble dans la même direction : vers le Seigneur qui vient. Il ne s'agit pas, comme on l'entend parfois, de célébrer le dos tourné aux fidèles ou face à eux. Le problème n'est pas là. Il s'agit de se tourner ensemble vers l'abside qui symbolise l'Orient où trône la croix du Seigneur ressuscité. Par cette manière de célébrer, nous expérimentons, jusque dans nos corps, la primauté de Dieu et de l'adoration. » Et le Cardinal de proposer concrètement cette orientation commune « au moins pendant le rite de la pénitence, pendant le chant du Gloria, les oraisons et la prière eucharistique » (Entretien donné à l'hebdomadaire Famille Chrétienne n° 2002, du 28 mai 2016).

Nous avons droit à la vérité. Car très souvent l'ignorance, les idéologies à courte vue, et le manque d'information objective créent et entretiennent un climat de suspicion et même de mépris envers les gestes et les symboles à promouvoir. Et cela est préjudiciable au silence sacré, à la vie intérieure et à l'unité des cœurs.

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