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n°19 Nouvelles du Bénin et voyage en Ethiopie

Voilà déjà cinq belles années que j’effectue un temps de mission au Bénin.

Si tout était nouveau la première année et sujet d’étonnement et de questionnement, beaucoup de choses sont devenues courantes. Cependant, il y a toujours des pratiques nouvelles et surprenantes à découvrir. Voici un petit florilège :


Au Bénin, la Covid ne nous a quasiment pas touchés. Dans les premiers temps, la peur et la méconnaissance des effets du virus aidant, tout était très strict : tout le monde devait porter le masque sous peine d’amende.

Puis ce fut un virus de riches : les gens à pied ou à moto sans masque n’étaient pas arrêtés (car ils ne pouvaient pas payer) mais le conducteur, même seul en voiture, devait être masqué.

A Parakou, on savait que le virus était à deux endroits précis et c’est pourquoi la police se trouvait justement là. Chaque jour, je passais près de ces clusters ; à leur approche je mettais mon masque pour le retirer aussitôt après. Je remercie la police de nous avoir ainsi protégés d’une infection certaine.


Pour la fête du Christ-Roi nous avons l’habitude de faire une grande procession du Saint Sacrement, avec un parasol tournant pour signifier la royauté du Christ – c’est une pratique issue de la cour des rois du Dahomey – précédé de jeunes filles jetant des confettis (à défaut de pétales de fleurs difficiles à trouver quand commence la saison sèche).

En novembre, les mesures sanitaires étaient encore très strictes. Mais profitant du passage du président de la République à Parakou, un curé lui a demandé s’il pouvait organiser la procession. Avec beaucoup de gentillesse le président a bloqué la pandémie et autorisé la procession.


A Noël, toutes les mesures sanitaires avaient disparu et nous avons vécu le reste de l’année sans être dérangés.

La veillée de Noël dans le monastère avec les sœurs et les petites orphelines fut un beau moment.


Dans les paroisses, on célèbre aussi le réveillon de Noël. Ici, dans la paroisse cathédrale, la préparation du mouton par les jeunes de la paroisse.


Les congés de Noël ont permis d’organiser un petit temps pour les guides et les louvettes.

La plus grande difficulté est de persuader les cheftaines de faire entrer les enfants dans une aventure avec une histoire, des déguisements, une mise en scène. Bien souvent, j’interviens pour « animer » les activités. Les cheftaines commencent à intégrer cet aspect du jeu dans la pédagogie scoute.


Comme l’année dernière, j’ai pu lancer une « présentation du mariage catholique en neuf soirées ».Une centaine de jeunes ont assisté à cette formation. Ayant diffusé la chose sur mon Facebook béninois j’ai eu la surprise de recevoir le message suivant :

Un pasteur protestant de Niamey me demande si ses fidèles peuvent suivre la formation. La question n’était pas l’enseignement catholique mais l’usage de la langue. J’ai pu trouver un traducteur sur la paroisse et ai eu la joie de voir trois fidèles protestants suivre toute la session.


En février, nous avons organisé un pèlerinage des jeunes de Parakou au sanctuaire marial diocésain. Un temps de marche, d’enseignement, de prières. Une très belle journée.

Une difficulté pour la marche : il n’existe qu’une seule route goudronnée où se croisent titans (les gros camions), voitures, motos et piétons (sans parler des cabris, porcs et pintades qui traversent à tout moment). La sécurité et la marche en « chapitres » laissent à désirer.

Mais la joie est là. Et finalement les jeunes béninois (de la ville) sont comme tous les jeunes : tenue décontractée, téléphone … Avec en plus pour les catholiques une jolie croix portée ostensiblement en permanence.

Nous sommes encore dans le temps de l’harmattan, ce vent sableux qui vient du Niger. La poussière envahit tout.

Ayant très peu de produits manufacturés (conserves, barres énergisantes) et pas de charcuterie, comment pique-nique-t-on ? Voici ce qu’on trouve le plus fréquemment : une ou deux boules d’akassa (une sorte de pâte faite à base de maïs cuit, moulu et trempé. L'akassa a un goût un peu fermenté.) Un morceau de poisson frit, et un jus de tomate. C’est un peu l’équivalent de notre sandwich.


Je pars aussi régulièrement en « station » en brousse pour y rencontrer les jeunes en tant qu’aumônier diocésain de la jeunesse.

Chaque station a un responsable catéchiste, qui en l’absence de prêtre (mais sous sa supervision) dirige un peu la communauté. Il a suivi une formation spécifique pour tenir ce rôle et sert bien souvent de traducteur. C’est aussi lui qui anime les célébrations de la parole le dimanche, lorsque le curé visite d’autres stations. Ainsi je fais souvent l’homélie à deux : je parle, lui traduit… parfois avec plus de mots et plus de gestes que moi.

Dans la station, il y a aussi une communauté de trois sœurs argentines. Elles font un travail missionnaire extraordinaire, particulièrement auprès des femmes des villages. Elles ont une très bonne connaissance du milieu rural et aident énormément les prêtres dans leur ministère.


Je prends parfois un ou deux jours pour visiter les petits villages plus typiques du Bénin avec des traditions particulières. Ici le village de Tanéka Berni situé près de Natitingou.

Il est arrivé plusieurs fois, qu’à mon arrivée dans un village, on réveille le vieux préposé à l’emploi, qui enfile une culotte de cuir (l’équivalent africain du « Lederhose » bavarois), prend une pipe et vient s’asseoir devant moi. Après un mot d’accueil, il reste stoïque, le regard porté sur l’horizon. Les villageois ont bien compris que les « touristes » voulaient voir du « typique ».


Les guérisseurs, les charlatans (c’est le vrai nom), les féticheurs m’amusent toujours autant :

1000 frs la consultation, 1,5 €


Le scoutisme me prend pas mal de temps. Nous avons mis en place une formation des chefs louveteaux, scouts et routiers. IL s’agit de remettre en marche des pratiques vraiment scoutes et non seulement de la figuration. Ici une formation sur l’utilisation de la boussole.


J’accompagne des jeunes spirituellement et, du coup, je découvre des coutumes propres à chaque ethnie :

Depuis quelques temps, une jeune fille me parlait de l’avancement de sa relation avec un garçon qui voulait se marier avec elle mais, de façon étonnante, qu’elle ne le connaissait pas plus que cela. J’ai vraiment eu le sentiment qu’il s’agissait d’un mariage de raison. De plus, comme souvent en Afrique, le garçon veut faire l’enfant avant le mariage pour savoir si elle sera fertile. Alors que le garçon travaillait dans une ville éloignée, c’est son frère qui est venu voir régulièrement la jeune fille pour la convaincre de la bonne intention du futur marié. La fille a mis comme condition pour aller plus loin que soit apportée la dot. Au Bénin en général, c’est le garçon qui offre la dot à la famille de la mariée.

Le garçon n’a pas beaucoup de moyens ; il a donc offert des noix de cola (c’est l’élément symbolique et traditionnel de la dot), 2 caisses de bière et sucreries (orangeade, coca etc.), 1 bouteille de vin, 1 bouteille de whisky, et 3 enveloppes contenant chacune 5000 frs (7,5 €), respectivement pour le papa, la maman et la fiancée. Les parents de la jeune fille ont accepté la dot. La fille est donc partie vivre avec le garçon…


Les travaux du monastère.

Les travaux du réfectoire et de la cuisine arrivent bientôt à leur fin, et l’évêque m’a demandé de ne pas lancer de nouveau chantier.

Le bâtiment vue de face : l'entrée du grand réfectoire

Le bâtiment vue de dos : avec la cuisine et l'entrepôt et également sur la gauche la petite cuisine africaine, c'est à dire sur feu de bois.

Les cinq années passées ont permis de voir surgir de terre : un château d’eau, un bâtiment de douze chambres et une grande salle, une chapelle, une clôture, l’installation de panneaux solaires, un réfectoire et une cuisine. (Je vais préparer une petite vidéo récapitulative).


Au nom des Sœurs Contemplatives de Jésus-Eucharistie je tiens à remercier tous les donateurs qui ont permis cette réalisation. Que Dieu vous bénisse et vous comble de grâce !


Avertissement important :

Et maintenant, MERCI SURTOUT DE NE PLUS RIEN DONNER POUR LA CONSTRUCTION DU MONASTERE car je ne saurais pas comment l’utiliser.



Au niveau de la pastorale de la jeunesse, j’ai eu aussi la chance de bénéficier de votre générosité pour supporter mon apostolat. Grâce à vous, j’ai pu financer de grands rassemblements de jeunes, des camps de formation. J’utilise aussi cet argent pour aider des jeunes ayant des projets d’entreprenariat. Je mets à leur disposition de l’argent pour monter leur commerce. Le remboursement sans intérêt se fait selon un échéancier.


Quelques exemples :


- L’imprimante industrielle (pour des bâches) d’une jeune femme est tombée en panne. Il fallait changer la tête d’imprimante : 750 €. Le choix était soit de laisser la machine à l’abandon, soit de lui redonner son outil de travail. Chaque mois elle me rembourse 60 €.


- Une jeune femme en fin d’étude de droit faisait un stage dans un cabinet d’avocat. Elle a dû le quitterà la suite d’abus et au chantage de son patron. Sans aucun soutien de famille et donc ne pouvant compter sur personne, elle s’est mise à fabriquer des sirops et des petits gâteaux apéritifs. Là aussi je lui ai prêté une somme pour lancer son commerce.

- Un jeune diplômé au chômage veut installer une petite boutique. J’investis 1 500 € dans son projet.

- Un jeune s’est lancé dans l’élevage de lapins. Là aussi j’ai financé. Et le remboursement est prévu petit à petit.


-J’ai pu financer l’inscription en 5° année de Faculté de médecine d’une jeune fille, soit 655 €. Orpheline de père, sa mère avait mis de côté la somme pour les frais de scolarité mais elle est elle-même tombée malade et a dû utiliser l’argent pour les frais médicaux. J’ai donc avancé la somme à sa fille (sinon impossibilité de continuer ses études) et mis en place un échéancier de remboursement (65 € par mois). Un mois après sa mère est morte. La jeune fille n’a plus rien et ce sont les amis de son groupe de prière qui se sont cotisés pour me faire le premier remboursement ! Au début je ne voulais pas le prendre mais tous ont insisté. Bien entendu, j’annule le solde de la dette.


Et il y a encore plusieurs petits projets comme cela. C’est du micro-financement pour des petits projets mais je vois le courage de ces jeunes et leur désir de s’en sortir.


Pourquoi est-ce que je vous raconte tout cela ? Tout simplement parce que ce sont tous vos dons qui me permettent de faire ces réalisations. Au nom de tous ces jeunes, mille mercis et que Dieu vous bénisse.


Avertissement important !!!

J’ai un gros problème. Il ne me reste plus qu’un an à faire au Bénin et le problème est que vous avez été trop généreux et que j’ai encore le porte-monnaie bien plein. Je vais certainement pouvoir faire encore beaucoup de belles choses avec la somme qui me reste.

Aussi, s’il vous plait, ARRETEZ DE ME FAIRE DES DONS ! Il y a tellement de situations difficiles partout que vous saurez certainement où vos dons seront plus utiles.


Cette année, je rentre mi-juin en France et repars au Bénin le 7 juillet.

Un passage plus court que les autres années, qui me permettra le 29 juin de fêter mes 25 ans d’ordination sacerdotale. Une rencontre fraternelle avec mes co-ordonnés est prévue. Nous allons nous retrouver à Cahors et prier sur la tombe de Mgr Maurice Gaidon, l’évêque qui nous a consacrés.

Je compte sur vos prières, soyez sûr des miennes.


Voici terminées les nouvelles du Bénin.


Ci-dessous, le récit d’un voyage en Ethiopie effectué en février.


Voyage en Ethiopie


En février, alors que l’Europe entière et une partie du monde était confinée, j’ai pu partir une quinzaine de jours visiter l’Ethiopie. Toujours avec le même but : découvrir un nouveau pays africain et rejoindre des amis expatriés : avec Jean-Marc, mon ancien CP, et moi son second, nous avions fondé en 1982 la patrouille du Jaguar de la 1ère Guyancourt – Scout d’Europe. Militaire, il vient d’arriver en poste à Addis-Abeba.


L’Ethiopie est sans aucun doute le pays le plus riche et varié de toute l'Afrique de l'Est avec une histoire millénaire, un pays jamais colonisé, des populations locales aux traditions toujours vivaces et parfois d'un autre temps, des paysages souvent rudes et sauvages, une faune conséquente.

Il y a 13 mois dans le calendrier éthiopien : 12 de 30 jours exactement et un de 5 jours.

La manière de donner l’heure est aussi différente : on commence à compter par les heures de nuit. A 18h pour notre manière de compter, il est donc 0h à la manière éthiopienne. A minuit pour nous, il est 6h ; à 6h il est 12h, à midi il est 18h ou 6h du jour… Quand on donne rendez-vous dans un village, il y a un bon exercice de conversion à faire pour ne pas rater la rencontre.


Voici une photo qui pourrait résumer l’Ethiopie : un porteur d’injera, un prêtre éthiopien, une éthiopienne avec sa robe brodée.


La cuisine éthiopienne se caractérise par l’usage de l’injéra. Une galette levée à base de teff (une céréale locale qui donne un goût un peu acide) qui sert à la fois de couverts et de récipient. Une fois l'ensemble des plats disposés sur l'injera, chaque personne utilise un bout de cette même galette pour se saisir des aliments. Il est possible qu'une personne porte la nourriture à la bouche d'une autre, il s'agit d'un signe d'amitié et de respect.

Une des grandes spécialités est la viande crue – délicieux. Il y a des vaches partout !


Les chrétiens orthodoxes sont très pratiquants et jeûnent tous les mercredis et vendredis. Ces jours-là sont servis des plats de légumes.

Le café, probablement né en Éthiopie, occupe une place centrale dans la culture et les traditions nationales. Il est servi, à l'aide d'une jebena, une cafetière locale, en toute fin de repas au cours d'une cérémonie où l'on brûle de l'encens. Les grains de café sont grillés sur place et l'on fait sentir leur odeur aux hôtes. Le sol est tapissé d'herbes (pour éloigner le mauvais sort).


Un caféier sur la route du monastère Ura Kidane Mehret du lac Tana. Les grains sont bientôt prêts à être récoltés.


A peu près partout dans le pays, en montagne comme en plaine, les maisons traditionnelles sont faites de longues perches d’eucalyptus sur lesquelles on rajoute de la boue mélangée avec de la paille de teff pour colmater.

La maison en bois d’eucalyptus, la paille de teff (à droite), le tas de bouse de vache séchée (au premier plan) qui serviront pour alimenter le feu de cuisine.


Le moyen de locomotion traditionnel le plus fréquent : l’âne et la charrette.


Le stationnement pour les ânes, Ici dans le petit village de Bibala près de Lalibela un jour de marché.


Et justement le petit village de Bibala, où l’on aperçoit le marché en plein air au fond.


On trouve mille merveilles dans ce petit marché de village de montagne

Des belles vaches à steak.


Des fruits et légumes


Du sel


Du café


Des produits manufacturés


Du miel, (avec les abeilles)


L’encens pour la cérémonie du café


L’artisanat local


En traversant le pays, on peut voir aussi mille choses.

Le moindre point d’eau sert pour faire la lessive.


En février, le teff venait d’être ramassé. Mis en gros tas, on fait marcher les vaches dessus (voir au milieu de la paille à droite), ce qui permet de séparer- en gros - le grain de la paille.


Puis on vanne, le vent emporte la petite paille et ne reste que le tas de grains de teff.


Les labours se font avec une charrue en bois tirée par des vaches.


Lors des longs déplacements, j’ai voulu expérimenter les auberges locales. En voici une typique.

Les repères sont simples : une tasse devant la maison = on y sert de l’alcool fermenté local (ici le bâton planté tout à gauche avec une tasse blanche au sommet) ; une assiette clouée au mur = un plat peut vous être servi (ici l’assiette verte clouée sur la gauche de la maison).


On distingue l’habillement en fonction du lieu d’habitation.

En montagne les hommes portent le pantalon long (ici à la fin du marché, les familles remontent dans la montagne avec leur chargement).


Par contre en plaine, les hommes portent le short.


Ici la panoplie complète : le turban, car c’est un prêtre, une grande écharpe blanche portée en permanence qu’on croise sur la poitrine en rentrant dans une église, le parapluie contre le soleil, le bâton pour les vaches.


Contrairement à la plupart des pays africains, ici ce sont les hommes qui s’occupent de la couture.


Les Ethiopiens ont un grand souci de leurs chaussures. Là aussi je n’ai jamais vu autant de cireurs de baskets qu’en Afrique.


Enfin, le personnage typique rencontré sur le bord de la route est le prêtre quêteur.

Il n’y a pas de quêtes pendant les messes, en revanche les prêtres (le bas clergé marié qui réside dans les villages) font des permanences de bénédictions au bord des routes.


Lorsqu’on rencontre le prêtre, il est de coutume de s’incliner, poser le front sur la croix qu’il tend, puis d’embrasser la croix, enfin de donner un petit billet pour l’entretien de l’église.


Parcs naturels

L’Ethiopie est aussi un paradis pour les amoureux de la nature.

Des paysages grandioses, mais aussi une diversité exceptionnelle de la faune et de la flore.


Au sud d’Addis-Abeba, niché à 1 846 mètres d’altitude, le lac Ziway fait partie des lacs de la vallée du grand Rift.

Ce jour-là j’étais le seul touriste (à cause de la covid). Il a fallu palabrer pour mettre une barque à l’eau.

On peut voir un marabout au premier plan à droite de la barque et tout un groupe de pélicans.


Toujours les pélicans.


Des ibis, goélands, spatules blanches, aigles pécheurs … des merveilles.


Puis en partant un peu vers l’Est on arrive dans les monts Balé.

Au parc de Dinsho, une petite heure de marche permet d’approcher le majestueux Nyala (grande antilope).


J’ai pu voir aussi un Colobe Guereza (singe avec une barbe blanche et une queue immense) et deux léopards.

Au bord de la route, il est commun de rencontrer les babouins,


et les phacochères (très pieux d’ailleurs).


En montant encore un peu on arrive sur le plateau de Sanetti.

C’est un paysage lunaire à 4000 m d’altitude.


Où pourtant passe une route en terre …


Toujours plus haut.


Et enfin la joie de rencontrer une dizaine de loups d’Abyssinie (malheureusement pas de très bonnes photos)

Vu aussi un rat-taupe géant.


Après ce parcours dans la montagne, descente plus à l’est dans le parc d’Awash

Paysage majestueux.


Là encore rencontres magnifiques avec une faune extraordinaire et surtout l’oryx beïsa. Animal parfaitement adapté à la vie dans le désert, il est capable de faire varier la température de son corps, emmagasinant de la chaleur le jour et la libérant la nuit, afin d'éviter la transpiration (qui est alors nulle en dessous de 40°C). Toujours dans le but d'économiser l'eau, ses urines sont peu abondantes et très concentrées.

Pas de bonnes photos, juste celle de mon guide.


Puis plus au nord, un passage rapide sur le lac Tana à 1840 m d’altitude, où se trouvent les sources du Nil Bleu. (Le Nil Blanc à sa source au Rwanda et rejoint le Nil Bleu à Khartoum au Soudan avant de descendre en Egypte).

Un hippopotame paisible.


Les Takwas : on trouve sur le lac des embarcations très anciennes construites en papyrus, une variété locale géante qui pousse sur les bords du lac. Quand je dis très anciennes, cela signifie que ces bateaux sont en effet construits de cette façon depuis des millénaires. Mais en fait, la durée de vie de ces bateaux est courte, quelques mois, car le papyrus est progressivement imbibé d’eau et perd de sa flottabilité. Les tankwas sont souvent posés debout contre un arbre sur les bords du lac, pour sécher. Heureusement, il ne faut qu’une journée pour construire un tankwa, ce qui consiste à lier entre eux des tiges de papyrus sur la base d’une « quille » en eucalyptus qui donne un minimum de rigidité. La flotte est donc régulièrement renouvelée. Car la bonne surprise, c’est qu’il y a toujours de nombreux tankwas sur le lac, utilisés essentiellement pour la pêche. Il s’agit de bateaux monoplaces, pesant 20 à 30 kg. Un fagot de papyrus, posé à l’intérieur, sert de siège.


Enfin plus au nord encore, marche d’une journée entière dans le parc des Monts Simien à 3200 m d’altitude.

Des paysages toujours aussi beaux.


Rencontre sur le plateau avec des paysans qui ramassent du fourrage.


Et la joie de voir encore une espèce animale endémique : le Babouin Gelada.


Histoire et culture de l'Ethiopie

Mais l’histoire et la culture ne sont pas en reste en Ethiopie.

Royaume millénaire, les rois éthiopiens se disent descendants de Salomon et de la reine de Saba (d’où l’étoile à cinq branches sur le drapeau éthiopien)


Les palais de Gondar sont impressionnants et l’histoire du Royaume passionnante. L’Ethiopie est le seul pays africain, avec le Libéria, qui n’ait jamais été colonisé. Les Italiens ont bien essayé mais ils ont dû repartir la tête basse.


L'Eglise orthodoxe éthiopienne


Mais surtout l’Eglise orthodoxe éthiopienne est fascinante, par son histoire, sa culture et son dynamisme aujourd’hui.

L'Église éthiopienne orthodoxe est une des premières Églises chrétiennes du continent africain. Plusieurs versions ont existé quant à l'introduction du christianisme en Éthiopie. La plus ancienne mention est celle du baptême d'un eunuque au service de la reine Candace par le diacre Philippe au 1er siècle. Cependant rien ne prouve que cela ait eu des conséquences en Éthiopie même à cette époque. Une autre version, tirée d'un texte apocryphe, fait intervenir saint Matthieu lui-même qui serait venu baptiser un roi axoumite et y aurait connu le martyre.

Toutefois, la version la plus vraisemblable renvoie au rôle de Frumence au IVe siècle. Sa présence auprès du roi Ezana aurait permis au christianisme de devenir religion officielle du royaume d'Aksoum vers 332. Après sa création dans le royaume d'Aksoum, le christianisme s'étend vers l'ouest et le sud.


L'Église d'Éthiopie est l'une des Églises d'Orient de théologie miaphysite ayant rejeté les dogmes établis lors du concile de Chalcédoine (451).


Au VIIe siècle, les conquêtes musulmanes et l'installation de plusieurs sultanats dans la Corne de l'Afrique l'isolent partiellement du reste du monde chrétien. C'est la source du mythe du royaume du prêtre Jean.


À partir du XIIIe siècle, avec la prise de pouvoir par la dynastie salomonide, l'Église connaît une période de renouveau théologique et de renforcement de ses positions. Elle diffuse la religion dans le pays, y instaure un système éducatif, et poursuit le développement liturgique et artistique débuté sous les précédents régimes. Au XVIe siècle, avec la guerre contre le sultanat d'Adal, le christianisme éthiopien est sur le point de s'effondrer avec le royaume, comme disparaît alors le christianisme en Nubie. C'est en partie l'arrivée de soldats portugais qui lui permet de survivre. Les missionnaires qui les accompagnaient sont expulsés du pays en 1632 après avoir tenté de convertir le pays au catholicisme.


Sous les règnes de Yohannes IV et Menelik II, l'Église trouve de forts soutiens politiques, le premier tente de minimiser la présence de missionnaires étrangers tandis que le second profite des conquêtes menées pour encourager en même temps des campagnes de christianisation.


A Addis Abeba et au nord du Pays (Lalibela, Aksoum) les chrétiens sont très présents.

Le matin (vers 5h) résonne dans la ville l’appel à la prière ; il ne s’agit pas de muezzin mais bien de prêtre et le dimanche il y a même la trompette.

C’est bien une église chrétienne mais énormément influencée par les pratiques de l’Ancien Testament.

Les fidèles ne mangent pas de porc, ni de tous les animaux défendus. J’ai raconté à mon guide tout ce que je pouvais manger au Bénin : écureuil, rat, agouti, épervier, porc, serpent, chenille, etc. Il était effrayé et dégouté.

On retrouve aussi la circoncision et les règles d’impureté.

Il faut retirer ses chaussures avant de rentrer dans l’église. Il y a une porte réservée pour les hommes, une autre pour les femmes et une femme ne peut entrer pendant la période de menstruation.


On sent ces règles très prégnantes et beaucoup de fidèles n’entrent même pas dans l’enceinte des sanctuaires.



Les églises ont généralement une forme octogonale ou circulaire.

La liturgie s’organise en cercles concentriques : les fidèles le plus à l’extérieur, ensuite les chorales, puis le clergé,


et, au centre, une pièce carrée fermée réservée strictement aux prêtres où se trouve l’Arche d’Alliance. Un peu comme notre tabernacle mais sans la présence réelle.

Ici l’Arche dans une église de Lalibela.

La véritable Arche d’Alliance serait gardée secrètement dans une des églises d’Ethiopie.


Le premier dimanche, je me suis rendu dans une grande église d’Addis-Abeba vers 7h30. La messe avait déjà commencé et personne ne pouvait entrer. La messe n’est pas célébrée tous les jours. Elle dure près de 3h30. Seules les personnes qui veulent communier ou assister à la totalité de la messe entrent dans l’édifice à 5h. Le reste des fidèles arrive tout au long de la messe et se tient à l’extérieur. Après la messe il y a des catéchèses publiques et des offices pendant toute la journée.


Une grande rangée de femmes avec enfants dans les bras se tenait près d’une porte. Vers la fin de la messe, il y a eu un grand mouvement, toutes ces femmes sont entrées dans l’église et sont ressorties 10 minutes après. C’est le dimanche suivant, en assistant à la messe à l’intérieur à Lalibela que j’en ai compris la raison.


Les règles de la communion sont très strictes : il faut être à jeun et surtout en état de grâce. Aussi lors du mouvement de communion, j’ai pu voir seulement quelques femmes venir communier, aucun homme, et en revanche une multitude de bébés et de petits enfants.

Les orthodoxes baptisent, confirment et communient les bébés le même jour (40 jours après la naissance pour les garçons, 80 pour les filles puisque Eve a été créée après Adam)

J’ai vu alors les mamans arriver avec leur bébé, le tendre vers le diacre, qui l’emmenait vers le prêtre et celui mettait dans la bouche de l’enfant une hostie « mouillette » (un morceau de pain levé consacré trempé dans le précieux sang). En fait tant que l’enfant n’a pas encore l’âge de raison, il peut communier car il ne fait pas de péché.


Autour de l’église, les gens suivent les prières, se lèvent, chantent, se prosternent.

On peut voir des personnes drapées d’un grand manteau orange. Ce sont généralement des vieilles personnes qui veulent terminer leur vie comme moine ou moniale.


A Bahar Dar vers le nord du pays, j’ai pu visiter le monastère Ura Kidane Mehret datant du XVIe sur le lac Tana.

Tout y est très symbolique.

Pour arriver au monastère il faut passer par trois grands portiques : le Père, le Fils et le Saint Esprit.

La marche de la porte est haute. Normalement il ne faut pas monter sur la marche qui bloque l’entrée de la porte mais l’enjamber : le Christ est la porte. Il ne s’agit pas de marcher dessus avec orgueil, mais au contraire de faire un grand pas en chevauchant la marche pour montrer qu’on veut changer de vie et se mettre à la suite du Christ. Ce système de marche qu’il faut enjamber se retrouve dans toutes les vielles églises.


L’église est ronde, pour symboliser la création, le monde créé.


A l’intérieur, il y a plusieurs cercles et endroits définis : pour ceux qui vont communier, pour les chorales, pour les hommes et pour les femmes.

Au centre, un immense bloc carré, le Saint des Saints, dans lequel se trouvent l’autel et l’Arche d’Alliance. Les murs sont magnifiquement décorés par des scènes bibliques ou le récit de la vie des saints ou des martyrs.


Quelques codes graphiques permettent de mieux interpréter les scènes.

Par exemple : les gentils ont deux yeux ; les méchants n’en ont qu’un.


Le démon est donc toujours représenté avec un seul œil.


Souvent les anges sont représentés sur les portes. Ils gardent le Saint des Saints.


Les peintures s’inspirent aussi de traditions orales et des évangiles apocryphes.

L’enfance de Saint Jean-Baptiste :

Sainte Elisabeth est morte peu de temps après la naissance de Saint Jean. Aussi celui-ci sera-t-il allaité par une biche dans le désert.


Moins habituel pour nous : La Vierge Marie corrige l’Enfant Jésus qui vient probablement de faire une bêtise !


Et bien sûr la Sainte Vierge Marie est représentée et vénérée partout.


Le sommet de ce voyage dans l’Ethiopie orthodoxe fut certainement Lalibela qui est un peu leur Rome. (Il y avait aussi Axoum autre centre religieux d’Ethiopie, centre de l'Empire aksoumite entre le Iᵉʳ et le VIᵉ siècle de notre ère. Mais en raison des troubles dans le Tigré, le déplacement n’y a pas été possible).


Lalibela est une cité monastique située à 2 630 mètres d'altitude, à 500 kms au nord de la capitale, Addis-Abeba. Lalibela est le plus grand site chrétien d’Afrique. Sa renommée s'explique par la présence de onze églises taillées dans la roche par ordre du roi Gebre Mesqel Lalibela (1172-1212), canonisé par l'Église éthiopienne.

Les églises sont creusées sous le niveau du sol, dans la roche sur plusieurs dizaines de mètres de profondeur et d’un seul bloc. Classés au patrimoine mondial de l’Unesco, elles sont protégées.


C’est dans la plus grande des églises que j’ai pu suivre la messe du dimanche (de 5h à 8h30).


La plus connue est certainement celle-là :


Celle-ci est un peu plus éloignée dans la montagne. Il s’agit du monastère Yemrehana Krestos


Dans un premier temps il faut donc descendre pour pouvoir rentrer dans l’église.


Il existe un tas de petits couloirs, des escaliers creusés dans la roche.


Pour entrer, il faut se mettre pieds nus et enjamber la marche. Tous les fidèles portent aussi un châle blanc qu’ils déplient sur les épaules et croisent sur la poitrine au moment de prier ou de rentrer dans un lieu de culte.


A l’intérieur, les fidèles prient,


Les prêtres bénissent,


discutent,


étudient


se font prendre en photo.


Lors de la messe les prêtres forment la chorale et se tiennent au milieu.

Au fond se trouve le chœur, fermé par un grand rideau où seuls les prêtres pénètrent. C’est derrière ce rideau qu’a lieu la consécration et que se trouve l’Arche d’Alliance.


Plusieurs fois pendant la messe, un ministre sacré sort dans la nef pour encenser les fidèles, faire embrasser la croix ou encore faire embrasser l’évangile. (Et malgré toutes ces embrassades et l’endroit confiné, la covid n’est pas passée).


Au milieu des prêtres se trouvent des tambours sacrés. Le tambour représente le Christ. Une peau est tendue à chaque extrémité. La grande surface symbolise le Nouveau Testament, la petite l’Ancien. Le lacet de cuir qui relie et tend les deux peaux symbolise la couronne d’épines.

Aussi, le son du tambour répand la bonne nouvelle.

Les prêtres et certains fidèles utilisent une canne qui est vraiment utile vu la longueur des cérémonies et la station debout presque permanente.

A mon arrivée en soutane dans l’église, les prêtres choristes (pas les célébrants) m’ont invité à venir m’installer avec eux et m’ont fourni la fameuse canne. J’ai pu assister à la messe aux premières loges. Un moment de grâce.


Les mélodies sont envoûtantes. Il s’agit bien de chants chrétiens rythmés par les tambours sacrés.

Les prêtres assurent la cadence en faisant tinter leur sistre. Le tempo est raisonnable.

C’est pendant cette messe que j’ai vu beaucoup de bébés communier.


Rentré à 5h en pleine nuit noire, je suis ressorti à 8h30.

Autour des églises, nombre de fidèles s’installaient pour passer la journée à prier, et suivre les enseignements.


Les cierges sont aussi très utilisés comme objet de dévotion


Autour des églises, dans plusieurs endroits réservés, on permet aux pèlerins exténués de se reposer là le temps qu’ils veulent. Personne ne les dérange. Ils sont vénérés comme des saints ayant accompli jusqu’au bout leur pèlerinage sur la terre.


L’Eglise orthodoxe éthiopienne est très dynamique et il semble y avoir beaucoup de vocations sacerdotales.

A Gondar j’ai pu saluer quelques séminaristes en formation. Logés très sommairement, ils étaient en train de répéter leurs leçons.

J’ai été très touché de la façon dont les orthodoxes m’ont partout accueilli. Ils ont pris le temps de m’expliquer leurs traditions et nous avons pu avoir de belles discussions sur la foi et l’Ecriture Sainte.



L'Ethiopie Moderne


Et puis retour à Addis-Abeba, où, grâce à Jean-Marc et Sophie, j’ai pu rencontrer une partie de la communauté francophone et la paroisse tenue par les frères de la communauté Saint-Jean.

Et là, autour de la capitale, c’est encore une autre Ethiopie, tournée vers le développement urbain et l’industrialisation.

En périphérie de la capitale, des quartiers entiers d’immeubles sont en construction. Tout est presque prêt : les rues, les magasins, mais tout est vide pour l’instant. Impressionnant.


Grâce à la gentillesse de l’ambassadeur d’Israël (avec la casquette), j’ai pu visiter une ferme ultramoderne. L’Ethiopie est déjà sur le marché international et est en train d’acquérir une capacité de production de fruits et légumes assez exemplaire.



C’est une vraie surprise de voir un pays aussi dynamique dans l’industrialisation.


A l’issue de ce merveilleux voyage dans ce pays féerique, je tiens à remercier Jean-Marc et Sophie pour leur accueil si chaleureux. Merci aussi aux pères de la communauté Saint-Jean. Merci à tous les amis des amis rencontrés.

La plus grande tristesse en quittant ce pays, c’est qu’il y reste encore autant de merveilles à découvrir.

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