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n°2 Le premier mois à Parakou

Lundi 17 octobre 2016

Quelle joie d’être accueilli par l’abbé Denis Le Pivain à la porte de l’aéroport !

Pour comprendre la générosité du geste il faut penser qu’il est venu exprès de Parakou, soit 400 kms et au moins 6h de trajet à cause de l’état des routes. En France c’est comme si quelqu’un faisait un aller-retour Versailles-Avignon juste pour aller vous chercher !

Mais le Bénin est bien là : une chaleur moite et surtout la voiture qui ne démarre pas, la batterie est cassée. A 23h sur le parking de l’aéroport un taxi échange contre finance sa batterie avec la nôtre. Sa voiture est immobilisée mais cela ne semble pas le déranger. On se débrouille. Nuit chez de généreux Français expatriés et départ à l’aube pour Parakou.

Mardi 18 octobre 2016

Je suis accueilli à l’archevêché de Parakou par Monseigneur Pascal N’Koué. Je vais y résider pendant un mois.

L’évêché de Parakou est atypique : il y a à l’intérieur une vie incroyable. Le porche d’entrée vous donne déjà le ton, nous sommes bien en Afrique !

En France, l’évêque est souvent tout seul dans son immense évêché. Un évêque français, ancien moine de son état, a pu dire au moment de son installation dans son nouvel évêché : « Avant, j’étais moine et on vivait en communauté, aujourd’hui je suis évêque et je vis seul comme un ermite ». Au contraire ici vivent l’évêque, le père économe, trois religieuses et une dizaine d’enfants adoptés par Mgr Pascal au fur et à mesure des années (orphelins, enfants abandonnés, enfants sorciers). Sans compter tous les étrangers de passage pour une ou deux nuits. Ce sont tous les bienfaiteurs, meneurs de projets ou membres d’ONG français, italiens, belges, allemands ou espagnols, qui passent voir l’évêque.

Le rythme est le suivant : 6h40 Laudes en commun, 7h Messe, 8h petit déjeuner pour moi seulement (les Africains ne déjeunent pas, ils prennent simplement quelque chose dans la matinée quand ils ont faim.)

Toute la matinée Monseigneur N’Koué reçoit sans rendez-vous toutes les personnes qui se présentent à l’évêché. C’est un va et vient de prêtres, de religieuses et religieux, de magistrats, de hauts fonctionnaires et de simples fidèles. Déjeuner à 13h, sieste jusqu’à 15h. Travail tranquille l’après-midi.

A 19h tous les soirs, les enfants et les sœurs se retrouvent avec l’évêque autour de l’image de Notre-Dame de Komighéa pour réciter le chapelet, les litanies de la Sainte Vierge et les vêpres, soit une heure de prière ensemble. Le jeudi et le dimanche le chapelet est remplacé par l’adoration du Très Saint Sacrement.

Après, petite séance de chant : j’apprends aux enfants l’Adoro te, le Salve Regina.

Le dîner se passe autour d’une grande table où les hôtes d’un soir se retrouvent. Ce sont des gens généreux qui avec persévérance et patience financent et assurent le suivi de projets dans le diocèse : puits, écoles, hôpitaux, orphelinats, fermes etc. Ce sont donc presque tous les soirs des rencontres passionnantes. Les soirs où il n’y a personne, après le dîner avec les enfants et les sœurs, je me retrouve seul avec l’évêque pour des discussions à bâton rompu. Je m’imprègne vraiment de l’esprit de l’Afrique.

Mercredi 19 octobre 2016

Grande journée diocésaine avec les prêtres et les principaux acteurs pastoraux au Centre Pastoral de Parakou. L’évêque présente le thème pastoral de l’année : « La vie intérieure et l’engagement ». C’est toute une invitation à l’oraison et à redécouvrir le silence.

Dans l’homélie il raconte l’histoire suivante : Un jour, Dieu en a assez d’être dérangé par les hommes, de leurs demandes continuelles et insignifiantes. Il veut se mettre hors de leur portée pour être tranquille.

-Je vais aller me cacher au désert ou au sommet d’une montagne.

-Le grand archange lui dit : O Dieu, vous avez créé les hommes tellement intelligents qu’avec leurs GPS et leurs drones il vous retrouveront.

-Je vais aller haut dans le ciel.

-O Dieu, l’homme est capable de faire des fusées et de vous retrouver.

-Que faire alors pour être introuvable de l’homme ?

-O Dieu, il me semble qu’il y a un endroit où l’homme n’est jamais et où vous serez bien tranquille sans risque d’être dérangé : C’est dans la profondeur et le silence de son cœur.

A la fin de la journée Monseigneur Pascal N’Koué me présente à toute l’assemblée. Il précise que je suis un spécialiste de la forme extraordinaire du rite romain, et invite tous ces prêtres à venir me voir pour apprendre la FE. Il insiste en disant que cet apprentissage permettra de mieux comprendre et célébrer la forme ordinaire. A l’issue de la réunion, deux prêtres viennent me voir pour prendre rendez-vous afin de commencer à apprendre l’ancien rite.

Je suis surtout sollicité sur la question de la célébration de la messe orientée. Car l’évêque a demandé à ses prêtres de célébrer la forme ordinaire de façon orientée à partir du 1er dimanche de l’Avent

Voici ce qu’il écrit dans son éditorial du bulletin diocésain du mois de novembre :

Mais le grand signe qui nous accompagnera toute l’année sera "la messe orientée", vraie rupture pour un nouveau départ spirituel, et cela à partir du premier dimanche de l’Avent, dans les communautés prêtes à le faire. C’est une belle proposition du Cardinal R. SARAH (Préfet de la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements). Son appel s’adresse à tous mais spécialement aux prêtres :

« Je veux lancer un appel à tous les prêtres. Peut-être avez-vous lu mon article dans L’Osservatore Romano il y a un an (12 juin 2015), ou mon entretien donné au journal Famille Chrétienne au mois de mai de cette année. A chaque fois, j’ai dit qu’il est de première importance de retourner aussi vite que possible à une orientation commune des prêtres et des fidèles, tournés ensemble dans la même direction - vers l’Est ou du moins vers l’abside - vers le Seigneur qui vient, dans toutes les parties du rite où l’on s’adresse au Seigneur. Cette pratique est permise par les règles liturgiques actuelles. Cela est parfaitement légitime dans le nouveau rite (de Paul VI). En effet, je pense qu’une étape cruciale est de faire en sorte que le Seigneur soit au centre des célébrations. »

Aussi, chers frères dans le sacerdoce, je vous demande humblement et fraternellement de mettre en œuvre cette pratique partout où cela sera possible, avec la prudence et la pédagogie nécessaire, mais aussi avec l’assurance, en tant que prêtres, que c’est une bonne chose pour l’Eglise et pour les fidèles. Votre appréciation pastorale déterminera comment et quand cela sera possible, mais pourquoi éventuellement ne pas commencer le premier dimanche de l’Avent de cette année, quand nous attendons le « Seigneur [qui] va venir sans tarder » ? (Londres, 5 juillet 2016). Voilà le tournant irréversible. Voilà "l’étape cruciale". Tournons-nous vers le Christ, soleil levant, et nous serons sauvés. La Vierge Marie, Notre-Dame de Komiguéa, nous aidera.

Du 20 octobre au 15 novembre 2017

Pendant tout le mois je vais accompagner l’évêque dans beaucoup de ses visites pastorales. Je découvre la simplicité et parfois la pauvreté de la vie en brousse ; je m’émerveille devant l’action civilisatrice de l’Eglise : construction d’églises, d’écoles, forages de puits, fondations de dispensaires, d’hôpitaux, de fermes.

Visite pastorale à Kika en brousse à 50 Kms de Parakou.

L’église est trop petite pour contenir les fidèles. On installe les gens dehors.

J’accompagne aussi Mgr N’Koué au grand séminaire de Gabaka. Chaque semaine il y donne un cours de liturgie pour les propédeutiques (les 1ères années) et les philosophes (2° et 3° année). A l’issue il me demande de prendre l’heure de cours des propédeutiques. Me voici parachuté prof’ de liturgie au grand séminaire !

Mardi 1er novembre Toussaint

Grand jour par excellence. L’après-midi, presque la totalité des fidèles des différentes paroisses de Parakou se retrouvent au cimetière chrétien.

On en profite pour remettre un coup de peinture sur les tombes

On les bénit

On lit la Parole de Dieu

On se recueille

On danse un peu

On exprime ses condoléances : « Pépé, nous vous souhaitons Bon séjour au Paradis, Repose en Paix »

On s’habille pieusement

C’est un pays chaud (le 22 novembre nous avons 35°), alors les Pompes Funèbres proposent leurs services avec simplicité :

« Un accueil glacial vous est réservé »

22 novembre 2016

Ce mois passé à l’évêché se termine. Je mange de tout, j’ai pris l’habitude des coupures d’eau et de courant, j’ai subi ma première crise de Palu, tout va bien je deviens béninois !

Je devrai ces jours-ci rejoindre le grand sanctuaire de Parakou et commencer ma véritable mission.

Je prie bien pour toute vos intentions

Avec toute mon amitié

Abbé Laurent Guimon

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